Christophe Piochon, au volant de Bugatti Automobiles
Par Christian Lienhardt - Les Echos

Cet ingénieur de trente-six ans est le premier Français nommé à la tête de Bugatti Automobiles, le fabricant de l’emblématique Veyron.

Il aurait pu, comme son père, avoir un destin de pêcheur. D’ailleurs, Christophe Piochon a passé toute son enfance à deux pas des plages du débarquement d’Omaha Beach. Mais ce passionné de sports mécaniques a préféré suivre les traces son grand-père qui, avant la guerre, travaillait, chez Renault, sur des prototypes de voitures.
Depuis quelques temps, cet ingénieur de trente-six ans, pilote Bugatti Automobiles SAS, le fabricant de l’emblématique Veyron, ce bolide, dont le prix hors taxe pour les versions « Grand-Sport » flirte avec les 2 millions d’euros. Un bijou qui peut « monter » sur piste à 431 km/heure et dont la production se fait à dose homéopathique, au rythme d’une quarantaine de véhicules par an.
« Je suis votre homme »
Confier à un Français, les rênes d’une marque de Volkswagen, en l’occurrence la plus prestigieuse, n’est pas banal. Mais la chance a voulu que cet élève de Institut des Sciences et Techniques de l’Ingénieur d’Angers fasse son stage dans les ateliers de prototypes de Wolfsbourg, en 1998, au moment précis où le constructeur allemand rachetait les droits sur la marque Bugatti. « Si vous avez besoin d’un ingénieur pour ressusciter cette marque et travailler sur des prototypes, je suis votre homme » avait-il alors lancé à ses directeurs. Divine surprise, l’homme a été pris au mot par sa hiérarchie.
Certes, de la langue de Goethe, il ne lui restait que des souvenirs scolaires. « Mais j’ai vite appris, dit-il, d’abord par cours intensifs, puis sur le tas avec les mécaniciens de l’usine de Basse-Saxe ». Ses premières armes, il les a faites au siège sur le nouveau prototype de la Sharan, puis sur la plate-forme de l’Audi A3, commune à la Golf 5 et à l’Octavia. Dès 2003, il débarque dans l’usine qui venait de sortir de terre à Dorlisheim-Molsheim, avec le titre de chef de projet « qualité-assemblage ». Là, il accompagnera l’aventure de la Veyron depuis sa phase de développement jusqu’à la production, non pas en série, mais à la commande et sur-mesure. Les routes vosgiennes, Christophe Piochon les a toutes faites pour « tester » le bolide : plus de 60.000 kilomètres, sans compter les essais sur la piste de l’aéroport de Colmar, entre deux atterrissages d’avions.
Depuis, ce père de jumeaux de trois ans, marié à une Tchèque, ne se sera éloigné de l’usine alsacienne que deux petites années, en 2011 et 2012, pour superviser le département qualité de la VW Phaeton fabriquée à Dresde. Jusqu’à ce qu’on lui propose de revenir chez Bugatti avec, cette fois, la fonction de directeur général. Avec aussi, mais il ne l’avouera pas, un nouveau challenge, celui de gérer l’après-Veyron : sur les 450 exemplaires programmés, il n’en reste plus que 70 à fabriquer. On sait qu’ensuite, un nouveau véhicule de luxe de cinq portes prendra la relève. Son nom de code? Le Galibier. Mais pas question pour Christophe Piochon d’en dire plus, ni de dévoiler le calendrier de sa mise en fabrication.
Christian Lienhardt

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